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pense-bête pour 2009
20 mai 2009

C'est l'histoire d'un mec...

Aujourd’hui j’ai enterré un oncle. Je ne peux pas m’empêcher de me dire que je vais passer les prochaines décennies de ma vie à enterrer les membres de ma famille les uns après les autres. C’est terrible. Dès que ma mère m’appelle de façon inhabituelle, j’appréhende. Je ne considère pas avoir été spécialement accablée de ce côté là jusqu’ici, ni épargnée. La vie est ainsi faite. Mais le temps passe et c’est difficile. Je suis la dernière de ma famille: je n’ai qu’un grand frère, ma mère est la dernière de 8 enfants et mon père de 5. J’ai donc une grande famille. Le fait d’être la « petite dernière », si l’on ne compte pas la ribambelle de petites cousins et petites cousines qui s’agrandit d’année en année, n’a un charme que très court dans le temps. Parce qu’on ne grandit jamais vraiment. J’ai toutes les peines du monde à m’imposer en tant qu’adulte. Tout le monde se rappelle de moi bébé, des conneries que je faisais quand j’étais petite, et ça colle à la peau. J’ai l’impression de devoir faire mes preuves mais j’ignore comment. Je n’ai pas vraiment grandi avec mes cousins et cousines; on était géographiquement proche parce qu’une très grande partie de ma famille maternelle a cette spécificité de peupler le même village, et pour beaucoup le même hameau de ce village, mais il étaient plus âgés que moi, à l’exception de mon cousin le plus proche. Alors on étaient « les petits » et eux étaient « les grands ». Maintenant ils sont presque tous casés, et pendant qu’ils faisaient des enfants, je fabriquais des bonhommes en rouleaux de papier wc. Ce qui est dur également, c’est de se dire qu’ils ont presque tous eu la chance de pouvoir inviter mes grands-parents à leur mariage, que leurs enfants ont connu leurs arrière-grands-parents. Je trouve ça très précieux. Moi il ne me reste qu’une grand-mère, la mère de ma mère. C’est le ciment de ma famille et je l’adore. Je ne peux pas imaginer ma vie sans elle. Ni mon mariage pour le coup. C’est drôle comme les choses paraissent immuables quand on est enfant. Je crois que tous, on ne pouvaient pas imaginer mes grands-parents l’un sans l’autre. On devait vaguement se dire qu’ils s’éteindraient dans leur sommeil, quelque part dans un avenir très lointain. C’est même pas qu’on l’espérait, c’est que ça ne pouvait pas se passer autrement. J’ai entendu quelque part récemment quelqu’un dire qu’on ne se sentait vraiment adulte que quand on perdait ses parents. J’ignore si c’est vrai, mais je crois que l’on cesse de se sentir enfants quand on perd ses grands-parents. L’année dernière, j’ai enterré ma grand-mère paternelle le jour où j’ai appris que j’étais admise dans la licence professionnelle que je convoitais. C’était un mélange des genres très particulier. J’avais l’impression que le destin me disait que ça y est, le temps de l’insouciance était terminée. L’enterrement d’aujourd’hui a commencé par la désormais incontournable visite à la chambre funéraire. J’ai toujours en tête l’horrible texte qu’on avait du lire en socio l’année dernière dans un cours sur la mort, qui détaillait plus que de raison le processus de thanatopraxie. J’ai alors du mal à voir la personne, j’ai toujours le sentiment que c’est une poupée raccommodée. Je suis toujours étonnée de l’immobilité parfaite des morts. Ils sont extrêmement clos. Et lourd. On ne dirait pas du tout qu’ils dorment. C’est très bizarre. J’ai vu peu de morts dans ma vie, je commence tout juste à m’habituer. Je ne sais pas si je voudrais qu’on me voie comme ça quand ce sera mon tour. Il paraît que ça aide à faire le deuil. Je ne sais pas. Je me rappelle que pour le premier enterrement auquel j’ai assisté, pour mon grand-père paternel quand j’avais 12 ans, j’étais choquée de le savoir dans cette boîte. Je ne pouvais pas me résoudre à trouver ça normal. Le fait qu’on l’enferme en plus dans un caveau noir et froid tout seul m’avait bouleversé. Depuis j’ai toujours envie de protester. La cérémonie a été insupportable de bondieuseries sans queue ni tête. Pour moi c’est une secte. Une fois avoir bien saisi le message global décliné à toutes les sauces, à savoir Dieu est amour et la mort sera bientôt de l’histoire ancienne, j’ai utilisé ce temps pour chercher quelque de réconfortant à dire à ma tante. En vain. Je ne suis pas plus imaginative que tout le monde. La mort me laisse sans recours. J’avais été vraiment choquée de l’attitude des gens lors de l’enterrement de mon grand-père maternelle. Au moment de venir bénir le corps, en général ils préféraient se tourner vers l’urne pour donner de l’argent afin de sauver leur âme, plutôt que de se tourner vers la famille pour les soutenir. C’est vraiment quelque chose qui me marquera à jamais. Enfin tout le monde est irrationnel dès qu’il s’agit de la mort, c’est comme ça. L’enterrement est vraiment un moment de remise en question, je pense que tous à un moment dans l’église, on a des regrets et on pense à la personne qu’on aimerait être. Moi-même à un moment je me suis dit que je devrais arrêter de ma compliquer la vie avec des futilités et accepter les choses et les gens comment ils viennent. Mais sortie de là, la vie nous rappelle que rien n’est simple, qu’on le veuille ou non. Arrivée à la maison, j’ai demandé à mes parents de me faire un rapide débriefing sur qui étaient toutes ces vieilles personnes à qui j’ai fait la bise. C’est déplorable de ne voir sa famille que devant des églises.

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